Depuis 2020, la perspective de fusionner les conventions collectives 66 et 51 suscite des interrogations dans le secteur sanitaire, social et médico-social. Les négociations avancent sans masquer des divergences persistantes entre partenaires sociaux sur les garanties collectives et les classifications.
Certains représentants syndicaux dénoncent une harmonisation par le bas, tandis que des employeurs pointent l’enjeu de la soutenabilité financière. Ce processus, loin de faire l’unanimité, expose des incertitudes majeures pour les salariés et les instances représentatives du personnel.
Plan de l'article
- Comprendre les spécificités des conventions collectives 51 et 66
- Fusion des conventions : quels changements pour les salariés et les employeurs ?
- Avantages, limites et points de vigilance de la fusion des conventions collectives
- Réformes du dialogue social : quelle place pour l’évolution des conventions collectives ?
Comprendre les spécificités des conventions collectives 51 et 66
La convention collective n° 51 joue un rôle central dans le secteur privé à but non lucratif, notamment dans le domaine sanitaire, social et médico-social en France. Elle régit les interactions entre employeurs et salariés, posant les bases des droits, devoirs et garanties collectives à l’intérieur des établissements. Quant à la convention collective 66, elle s’adresse à des structures proches, mais s’en distingue sur plusieurs aspects concrets : classification des métiers, niveaux de rémunération, accès à la formation continue.
Au cœur de ces conventions, le dialogue social s’articule autour de plusieurs acteurs. Salariés, employeurs, délégués syndicaux, services RH, chefs d’entreprise : chacun occupe une place bien définie. Le comité social et économique (CSE), mis en place dès 11 salariés, porte la voix du personnel et devient l’interlocuteur clé pour négocier ou consulter sur les orientations majeures.
Pour mieux saisir la répartition des rôles, voici comment les responsabilités se déclinent :
- Les organisations syndicales négocient les accords collectifs et représentent les intérêts des salariés.
- Les services ressources humaines assurent la médiation entre la direction et le personnel, et veillent à l’application correcte des accords.
- Le chef d’entreprise organise la consultation du personnel et pilote le dispositif de dialogue social.
Le cadre légal encadre strictement ces interactions et impose une régularité dans les échanges. À l’échelle nationale, la négociation s’intensifie pour rapprocher la 51 et la 66. Les discussions avancent, parfois laborieusement, sur des sujets sensibles comme la classification des emplois, le temps de travail ou les garanties collectives. Ce rapprochement affecte la gestion RH et la sécurité sociale des salariés : chaque avancée, chaque compromis, redessine l’équilibre des droits et obligations.
Fusion des conventions : quels changements pour les salariés et les employeurs ?
La perspective d’une fusion des conventions collectives dans le secteur social et médico-social soulève des questions très concrètes. Les repères traditionnels vacillent. Depuis les Ordonnances Macron de 2017, le Comité social et économique (CSE) a déjà redéfini le paysage : cette instance unique remplace l’ancien écheveau de représentants, allant des délégués du personnel au CHSCT.
Désormais, le CSE s’impose à toutes les structures de plus de 11 salariés. Il possède la personnalité civile, gère ses propres moyens et centralise la représentation, la consultation et l’information des salariés. Sa mise en place peut s’effectuer à l’échelle de l’entreprise, d’un site, d’une Unité Économique et Sociale (UES), voire sous la forme d’un CSE interentreprises selon les accords collectifs. Ces différents formats offrent la possibilité d’ajuster la représentation du personnel à la réalité de chaque terrain.
Pour les salariés, cette fusion vise à unifier les droits et à clarifier les dispositifs. La façon dont sont consultés les représentants, la définition des périmètres d’établissement ou la composition des instances peuvent désormais être fixées par accord collectif ou, à défaut, décidées par l’administration. Voici les principaux changements à anticiper :
- Les représentants du personnel doivent s’adapter à des contours institutionnels renouvelés
- Les périmètres de la négociation collective se redéfinissent
- La gestion du patrimoine social devient plus centralisée
Les employeurs, de leur côté, naviguent dans un environnement réglementaire revisité et parfois complexe. Anticiper les évolutions devient incontournable : la réussite de la fusion dépend d’une attention particulière portée aux modalités de consultation, à l’articulation des accords collectifs et à l’organisation des établissements distincts.
Avantages, limites et points de vigilance de la fusion des conventions collectives
Avec la création du Comité Social et Économique (CSE), la fusion des conventions collectives transforme en profondeur les pratiques sociales. Le CSE concentre désormais l’information, la consultation et la prise de décision dans une seule instance. Résultat : les échanges entre direction et représentants du personnel gagnent en lisibilité. Les consultations obligatoires, qu’il s’agisse de stratégie, de finances ou de politique sociale, se déroulent dans un cadre mieux structuré, limitant le morcellement des interlocuteurs.
Le fonctionnement budgétaire évolue lui aussi. Le CSE gère deux enveloppes : un budget de fonctionnement et un budget dédié aux activités sociales. Dans certains cas, la loi autorise une certaine souplesse entre ces postes, ce qui permet de répondre plus précisément aux besoins des salariés. Toutefois, cette flexibilité exige une gestion comptable rigoureuse. Les expertises, prises en charge totalement ou partiellement par l’employeur selon leur objet, constituent un outil précieux pour les élus, à condition de maîtriser leur impact financier.
Les mandats des élus ne peuvent être renouvelés que trois fois, pour une durée de deux à quatre ans. Ce renouvellement favorise la rotation des représentants, mais pose la question de la transmission de l’expérience collective. Lorsqu’un établissement perd sa qualité d’entité distincte, les mandats des élus s’arrêtent immédiatement : un tournant parfois abrupt pour les équipes concernées.
Le bon fonctionnement du CSE suppose également la création de commissions dédiées à la santé, à la sécurité ou à l’égalité professionnelle. Leur efficacité dépend de la capacité des élus à se former, alors même que la formation économique n’est plus renouvelable en cas de réélection. Cette situation oblige organisations syndicales et employeurs à anticiper les besoins de formation, sous peine de voir la qualité du dialogue social s’amenuiser.
Le dialogue social s’inscrit dans une dynamique de réformes qui modifient en profondeur le droit du travail. Depuis les ordonnances Macron de 2017, la création du CSE vise à fluidifier les échanges entre employeurs et représentants du personnel. Ce mouvement, piloté nationalement, s’accompagne d’une réécriture progressive des conventions collectives, à commencer par la convention n° 51.
Aujourd’hui, organisations syndicales et employeurs négocient dans un cadre renouvelé où la négociation collective occupe le premier plan. La convention n° 51 s’inscrit pleinement dans cette logique : elle permet une adaptation plus fine des accords aux besoins de chaque entreprise, sans sacrifier les droits fondamentaux des salariés. Maîtriser les marges de manœuvre offertes par le code du travail et les récentes jurisprudences de la Cour de cassation devient indispensable pour les partenaires sociaux.
Pour accompagner cette évolution, l’offre de formation des élus du personnel s’élargit : INTEFP, Celiade, Format Dialogue… Ces organismes forment à la négociation, à l’information et à la consultation. Les règles concernant les délais, le nombre d’heures de délégation ou la définition d’établissement distinct sont désormais fixées par décret ou via des accords collectifs, sous la surveillance du juge judiciaire ou de l’administration (Dreets).
Le paysage conventionnel se transforme, répondant à un besoin d’agilité. Pour rester efficaces, les entreprises doivent ajuster en continu leurs pratiques. Les conventions collectives, loin de constituer des textes immuables, deviennent de véritables leviers au service de la performance et du dialogue social. Les lignes bougent, et la capacité à s’adapter fait la différence.