Seuls 8 % des habitants du globe vivent aujourd’hui dans une démocratie dite « pleine », d’après le classement établi chaque année par The Economist Intelligence Unit. Singapour figure parmi les économies les plus développées, tout en étant classée bien plus bas que certains de ses voisins européens sur l’échelle démocratique. Depuis dix ans, l’indice mondial de démocratie accuse une tendance à la baisse, marquant un recul des libertés civiles dans la majorité des régions. Les écarts entre pays nordiques et États autoritaires s’accentuent, tandis que de nouveaux critères émergent pour mesurer la qualité des institutions et la participation citoyenne.
Plan de l'article
Comprendre l’indice de démocratie : origines, critères et limites
Depuis une vingtaine d’années, l’indice de démocratie s’est imposé comme baromètre global. Chaque année, les pays sont scrutés à travers cinq prismes décisifs, chacun provoquant son lot de débats : trop de place à la politique, pas assez à la société civile, ou l’inverse. Ce classement met surtout à nu les points de tension, là où des chiffres prétendent tout dire… mais ne disent jamais vraiment tout.
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Pour éclairer ce score composite, voici sur quoi repose cet indice :
- La solidité du processus électoral et la réalité du pluralisme
- Comment, concrètement, le gouvernement fonctionne sur le terrain
- L’implication directe ou indirecte des citoyens, autrement dit la participation politique
- L’ancrage profond de la culture politique
- Le respect tangible des libertés civiles au quotidien
En croisant ces paramètres, l’indice établit quatre grandes familles : démocraties pleines, démocraties imparfaites, régimes hybrides et régimes autoritaires. Parmi les spécialistes, cette grille alimente les controverses. Chacun défend sa vision, rejette la soi-disant neutralité ou conteste la hiérarchie.
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Certains détracteurs rappellent que ces catégories restent marquées par des références occidentales et que la démocratie, d’un bout à l’autre du monde, prend des formes qui échappent parfois à ce classement. Où tracer la frontière entre État de droit et pouvoir vertical ? L’évaluation sociale du pluralisme ou du débat public ne se laisse jamais figer par une note unique.
Au fil du temps, ces interrogations ne faiblissent pas. Le débat sur la position de la France comparée au modèle nordique, la place réelle de Singapour, ou les différences entre libertés collectives et stabilité politique, illustre combien cet indice reste un terrain mouvant, révélateur d’une tension permanente entre exigences citoyennes et équilibre institutionnel.
Quels pays dominent (ou chutent) dans le classement 2020 ?
La Norvège occupe la première place depuis des années, avec une culture politique où le dialogue entre institutions et citoyens fait figure de règle d’or. Autour d’elle, le cercle nordique s’impose également. Voici les autres piliers du haut du classement :
- Islande
- Suède
- Finlande
- Danemark
Sur le Vieux Continent, chaque pays avance à sa façon. L’Allemagne brille par sa transparence et l’énergie de son débat public, même sous tension. L’Irlande s’illustre dans la recherche du compromis. La France, de son côté, reste cantonnée à la catégorie démocratie imparfaite : la défiance envers ses dirigeants et la crispation des rapports citoyens-élus freinent nettement sa progression. Le Royaume-Uni, autrefois plus haut dans la hiérarchie, ressent encore la secousse du Brexit dans son positionnement.
L’Europe centrale connaît, elle, un passage difficile. Hongrie et Pologne, après avoir progressé, retombent en catégorie régime hybride : les contre-pouvoirs s’affaiblissent, la justice perd son autonomie, et la pluralité se réduit. A contrario, en Amérique latine, certains pays esquissent un redressement plus ou moins marqué.
Voici quelques-unes des variations les plus frappantes observées durant cette période :
- L’Uruguay s’impose comme rare success story, profitant d’une stabilité politique consolidée au fil du temps
- Le Venezuela subit quant à lui une descente ininterrompue hors du champ démocratique
En Afrique et au Moyen-Orient, l’immobilisme pèse lourd. Les avancées s’opèrent au ralenti, parfois se diluent, et les libertés restent en général l’apanage d’une minorité.
Pour saisir d’un coup d’œil la répartition des modèles politiques dans le monde, voici où se situent les principaux groupes de pays :
- Démocraties pleines : Norvège, Islande, Suède, Nouvelle-Zélande
- Démocraties imparfaites : France, Portugal, Inde
- Régimes hybrides : Hongrie, Pologne, Turquie
- Régimes autoritaires : Russie, Chine, Venezuela
Pourquoi l’indice de démocratie pèse dans les relations internationales
Ce classement, au-delà d’une simple photographie annuelle, influe directement sur le poids d’un pays à l’échelle globale. Un score en hausse rassure les marchés, favorise la coopération, ouvre de nouvelles perspectives économiques. Au contraire, un effondrement isole, refroidit les partenaires stratégiques, inquiète les investisseurs et pousse à la méfiance là où la confiance faisait encore loi.
Monter dans la hiérarchie, ce n’est pas qu’une question de prestige : cela dope l’attractivité du pays, détend les relations commerciales et dope la capacité à attirer des investissements. À chaque baisse, les conséquences suivent rapidement, du climat des affaires au poids dans les tractations diplomatiques. Parmi les impacts les plus fréquents, on retrouve :
- L’ouverture (ou la fermeture) de nouveaux marchés selon le positionnement du pays
- Le niveau d’engagement de la société civile, souvent instable quand la confiance s’étiole
- La capacité à peser dans des alliances ou à entraîner d’autres nations dans des coalitions
L’indice, finalement, agit comme une jauge très scrutée. Les retombées s’observent aussi bien dans les sphères économiques que politiques. Dès qu’une baisse est constatée, les partenaires réagissent ; à l’inverse, une amélioration redore immédiatement le blason du pays sur la scène internationale.
Évolutions récentes : tendances marquantes et surprises de ces dernières années
Aucune photographie n’est définitive. Des pays réputés stables ont parfois dévissé en quelques années, choc politique, crise institutionnelle ou affaissement du débat public, les raisons varient mais les effets se font rapidement sentir. Dans d’autres cas, on assiste à des sursauts démocratiques, le retour d’un vrai pluralisme ou un regain d’engagement citoyen. Ces dernières années, l’Asie ou l’Amérique latine ont offert des avancées notables ; certaines régions renouent avec des formes d’ouverture. L’idée de démocratie, pourtant, reste éloignée pour la majorité des pays du Moyen-Orient.
Voici trois dynamiques qui marquent la cartographie actuelle des évolutions démocratiques :
- En Afrique subsaharienne, les revers démocratiques s’enchaînent et les améliorations sincères restent exceptionnelles
- Dans la région Proche-Orient et Afrique du Nord, la stagnation persiste et freine toute velléité de transformation politique
- Parmi les démocraties libérales, une défiance persistante incite à repenser les interactions entre gouvernés et gouvernants
D’une édition à l’autre, l’équilibre n’est jamais stable. Contestations, alternances radicales, sursauts inattendus, la démocratie ne se fige pas, mais s’expose à chaque instant à de nouveaux jeux de force. L’histoire de ce classement le rappelle : chaque pays, même au sommet, sait qu’aucune position n’est jamais garantie.